Crédit photo - NBC News. Abubakar Shekau, chef du groupe extrémiste islamiste nigérian Boko Haram.
Les attentats du CharlieHebdo ont créé des rassemblements de masse et ont amené la compassion de millions de personnes. Dans cet article, je ne veux pas diminuer les répercussions de cette attaque dans le monde et le combat pour la liberté d’expression qu’elle a engendrée. Je tiens par contre à parler de ce qui s’est produit au Nigeria au même moment, qui n’a fait la première page d’aucun journal et dont personne ne s’est senti assez concerné pour sortir dans la rue manifester.
C’est le 3 janvier dernier que les extrémistes islamistes nigérians de Boko Haram ont attaqués Baga, carrefour commercial régional situé dans le nord-est du Nigéria. Lourdement armés, les insurgés islamistes ont pris le contrôle de la ville et de la base militaire qui s’y trouve. Quelques jours plus tard, la ville et une quinzaine de villages des alentours ont été complètement rasés. Les combattants ont abattu plus de 2000 personnes. Un témoin a raconté à l’AFP avoir marché sur des corps pendant cinq kilomètres pendant sa fuite. La majorité des victimes seraient des enfants, des femmes et des personnes âgées.
La question que je me pose est : pourquoi n’en avons-nous pas entendu parler dans les médias? L’attentat de CharlieHebdo est venu éclipser la nouvelle. Pourtant on parle de 2000 morts contre 17 pour les attaques en France. Est-ce que la vie des Français vaut plus que celle des Nigérians à la vue du monde? Est-ce parce que c’est un média qui a été attaqué? Les médias se sentent plus concernés, donc ils en parlent plus, la population se voit bombardée d’information sur le sujet, ce qu’il l’amène à s’émouvoir et en est scandalisée.
D’autres attaques ont été occultées par les attentats en France. Toujours au Nigéria, samedi, une fillette de 10 ans avec une bombe sur elle a commis un attentat-suicide et a fait au moins 19 morts. Dimanche, deux femmes kamikazes se sont fait exploser dans un marché, tuant quatre personnes.
Peut-être que les gens ne se sentent plus concernés vu le nombre d’attentats que l’on peut dénombrer sur le continent africain. On se sent moins proche que de nos cousins français. Pourtant nous sommes tous des êtres humains, on devrait se sentir autant concerné par l’assassinat d’un Français, d’un Américain, d’un Nigérian que d’un Chinois ou d’un Russe. Pourtant ce n’est pas le cas.
Nous devons ouvrir encore plus nos consciences et développer notre empathie et notre compassion. Les atrocités se multiplient et des centaines de personnes sont massacrées chaque jour dans une Afrique déjà fragile. On entend parler du combat contre l’État islamique, ou contre Al Qaïda, mais qu’en est-il de Boko Haram?
Audrey-Anne Maltais – Rédactrice Web – CEUC
Wow! Merci. C’est aussi ce qui m’a frappé dans les derniers jours et même les derniers mois. Les attentats au Canada et en France ont carrément monopolisé les nouvelles ici comme ailleurs dans les pays « occidentaux ». Mais justement, qui se sent aussi concerné par Boko Haram, la Syrie, le Soudan, l’Ukraine ou encore le Nord du Mali?
Certains conflits durent depuis des décennies et la majorité des gens ne le savent même pas. Le conflit Israélo-palestinien ou encore celui en République démocratique du Congo en sont de bons exemples. Il y a des zones de tensions civile ou ethniques en Tchétchénie, au Yémen, en Colombie, au Liban, en Palestine, en République centrafricaine, en Somalie et j’en passe.
Il y a du terrorisme dit actif aux Philippines, au Kenya, au Yémen, en Irak, dans le Nord du Cameroun, au Nigéria, en Égypte, en Libye, en Tunisie, etc. Certains conflits actuellement politiques menacent de dégénérer par exemple en Ouganda, au Bangladesh, en Thaïlande…Le Proche-Orient, l’Asie-Pacifique, l’Afrique, l’Afghanistan, etc. sont toutes des zones de tensions géopolitiques et géostratégiques.
» Je suis Charlie ». « Je suis Baga ». « Je suis la RDC ». « Je suis le Sud-Soudan ». « Je suis la Syrie »…Mais, « je suis d’abord et avant tout un humain », un humain supposément doté de raison. Un être social qui le distingue des autres êtres vivants. Une raison qui le pousse à faire des atrocités…
« Je suis le monde ».
Un article très apprécié!
J’étais effectivement, comme le souligne l’auteur et Stéphanie, désabusée par le fait que ces actualités n’aient pas été couvertes!
Il est important de continuer à parler de ce qui se passe dans tous les pays. « Nous sommes le monde ».
Actualisons régulièrement les réseaux sociaux avec des informations, ex: http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2015/01/12/les-8-infos-a-rattraper-depuis-l-attentat-du-7-janvier_4553846_4355770.html.
Soyons concernés, nous ne sommes rien sans l’autre.
En effet, c’est très encourageant d’apercevoir que dans la famille de la presse, certains membres comme l’auteur de cet article se préoccupent des actualités à travers le monde. Le terrorisme quel que soit sa zone géographique doit être dénoncé et combattu par tous. Espérons que ce message soit largement lu et compris.
Merci à Audrey-Anne Maltais pour cette contribution.
Bravo pour cet article révélateur d’un problème de couverture médiatique des évènements. L’on est alors en droit de se demander s’il n’ y a pas une certaine manipulation consciente ou inconsciente des médias par des tendances politiques et des enjeux économiques. À cela s’ajoute le problème de la hiérarchisation des hommes, des pays ou des continents qui renvoie à l’idée des sous-hommes et des hommes supérieurs.
Comme Audrey-Anne et Stéphanie ont si bien souligné, certains conflits et attentats passent sous silence dans les nouvelles ou alors sont à peine effleurés. Il y a aussi l’inaction de la communauté internationale dans certains cas. Par exemple, le massacre et la perte de vies humaines en Syrie et au Nigeria n’ont pas l’air de préoccuper les dirigeants de ce monde, sinon, une véritable coordination serait mise sur pied et des solutions auraient été trouvées.
Rien ne justifie les crimes, les attentats et les assassinats. Réglons nos différends, nos opinions divergentes et nos revendications par le dialogue et la réconciliation.
Les dirigeants religieux (toutes tendances confondues) doivent faire un réel travail de sensibilisation et de rééducation de leurs fidèles dans l’acceptation de la différence.
Les médias doivent faire un effort pour garder l’impartialité dans l’exercice de leurs fonctions afin que leur crédibilité ne soit pas entachée ou remise en cause.
Pour endiguer le terrorisme, il est important d’identifier ses racines profondes (au-delà des pistes religieuses que la lecture de façade nous révèle); et de trouver des solutions préventives et durables, car les drones dans le désert pour pilonner les groupes terroristes et les assauts en ville pour libérer les otages ne sont que des solutions curatives.
Je salue la mémoire de toutes les victimes du terrorisme et la bravoure de ceux qui risquent leur vie pour sauver les otages.